Communiqué de presse n°11
Un budget en augmentation mais bientôt un déontologue à l'Élysée
En 2023, le budget de la présidence de la République est en fort dépassement. Voté à hauteur de 114,4 millions d’euros, il s’élèvera en réalité à un montant compris entre 123 et 127 millions selon les indications fournies par la présidence dans son projet de budget 20241. Autrement dit, en 2023, le budget élyséen augmentera entre 12 et 15% soit trois fois plus que l’estimation initiale.
Pourquoi ? Les explications de l’Élysée sont encore partielles et parfois emberlificotées. Le rapprochement avec les documents antérieurs permet les constatations suivantes :
- Le montant des dépenses de personnel, qui représentent la plus grande part des dépenses (60% du budget) est conforme aux prévisions. Cette maîtrise repose sur le maintien de postes vacants, la présidence ne maitrisant pas l’évolution des salaires des agents issus des différents ministères (600 agents, dont 310 militaires, sont mis à disposition contre remboursement par 39 administrations différentes). Ces efforts, pour avoir connaissance des facteurs faisant évoluer la masse salariale, se heurtent à la réticence des administrations concernées.
- Les dépenses de fonctionnement prévues en augmentation de 12,5% (par rapport à 2022) augmenteront de 25% à 20,4 millions. En conséquence, l’estimation 2024, à hauteur de 19 millions manque de lisibilité (du moins tant que l’on ne dispose pas d’une argumentation précise).
- Ce sont les dépenses de déplacements qui explosent, prévues à 16 millions, elles atteindront 23 millions, soit une hausse de 44% qui s’ajoute à une hausse, en 2022, de 52,6%. Si ce dernier chiffre s’explique par le fait qu’en 2021 les déplacements avaient été réduits, la progression 2023 mérite d’être « documentée » selon l’expression favorite de la Cour des comptes, qui, dans son rapport sur l’année 2022, souligne que le coût unitaire des déplacements s’est accru, (sans pour autant fournir d’exemples détaillés comme elle le faisait antérieurement). Cela peut être expliqué notamment par un usage plus fréquent de l’Airbus A330, plus coûteux en carburant, ainsi que par la taille des délégations accompagnant le chef de l’État. Le coût des déplacements présidentiels évolue ainsi : 10,4 millions en 2021 ; 15,9 en 2022 ; 23 en 2023 (prévus 16) ; 21 estimés en 2024.
Si le Président doit disposer des moyens nécessaires à son activité, dont on admet volontiers qu’elle varie en fonction de l’actualité, il est important qu’il le fasse au meilleur coût. Il convient de rappeler que, de ce point de vue, un déplacement international de François Hollande était en moyenne plus économe qu’un déplacement de Nicolas Sarkozy.
Quoiqu’il en soit, il faut souligner que le montant global du budget élyséen (125 millions) demeure modeste dans l’ensemble des dépenses publiques (1539 milliards). Pour 1 000 euros de dépenses publiques la présidence intervient pour 8 centimes d’euros. C’est dire que la question des économies est davantage une question d’’exemplarité et de symbole dans l’emploi des deniers publics qu’une question d’excès de la dépense publique.
Cela étant, les dépassements de l’année 2023 sont toutefois étonnants. Du jamais vu depuis qu’existe un budget présidentiel consolidé. La réorganisation des services mise en place par Emmanuel Macron avait pourtant pour finalité un fonctionnement plus efficace et économe. Il est vrai que les rapports de la Cour des comptes (à défaut d’un contrôle parlementaire devenu malheureusement inexistant) ont souligné certains dysfonctionnements qui subsistent.
L’autonomie financière de l’Élysée et le fonctionnement actuel de l’Assemblée nationale ne permettant pas d’envisager que l’examen du budget fournisse les précisions qui s’imposent (le dernier rapport de la commission de finances sur ce sujet étant inconsistant), il faudra attendre le prochain rapport de la Cour, en juillet 2024, pour avoir quelques explications supplémentaires.
En même temps, l’Élysée a manifestement conscience de l’importance de la déontologie. En réponse à une question écrite de Christine Pirès-Beaune, députée PS du Puy de Dôme et vice-présidente de l’Observatoire de l’éthique publique, la Première
ministre indiquait que l’Élysée envisageait l’institution d’un Déontologue à l’Élysée qui pourra apporter aux 800 personnes en poste à l’Élysée « tout conseil utile au respect de leurs obligations déontologiques » et finaliser la charte de déontologie mise en place le 19 décembre 2014 par François Hollande dont la révision est en cours depuis février 2019, date d’une précédente réponse à une question sur ce sujet.
Lorsque cette création sera effective, l’on peut espérer raisonnablement que le Gouvernement instituera un Déontologue du Gouvernement ainsi que l’Observatoire de l’éthique publique propose depuis 2019
(https://www.observatoireethiquepublique.com/nos-propositions/notes/note-25-pour- linstitution-dun-deontologue-du-gouvernement.html)
Fichiers
Publié le 06/10/2023
L'auteur
René Dosière
Président