Réforme de l'asile :
pour un moratoire sur la CNDA
La réforme dite « Darmanin », en cours de discussion au Parlement, aboutira prochainement à une loi « pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration ». Organisée autour de l’objectif d’accélération des procédures à la Cour nationale du droit d’asile, cette réforme prévoit principalement l’abandon de la collégialité en tant que principe – celle-ci devrait devenir l’exception – et la délocalisation de certaines audiences hors du siège de Montreuil. Pourtant, de nombreux éléments montrent qu’une telle réforme n’est pas utile. A priori coûteuse malgré le flou entretenu sur le montant exact de la « territorialisation » de la Cour, cette réforme serait même contreproductive. Dans ces conditions, un moratoire sur cette partie impensée et trop peu connue de la réforme Darmanin s’impose. Il permettrait à la fois d’interroger la nécessité d’une nouvelle réforme, de mesurer l’importance de la collégialité dans le contentieux de l’asile de manière à décider en connaissance de cause, de procéder à une évaluation des coûts et de l’opportunité de la territorialisation et, enfin, de penser une réforme axée sur les véritables besoins de la Cour. Parmi ces derniers figurent au moins la nécessité d’une meilleure formation des juges de l’asile et celle d’un cadre déontologique clair.
Après plusieurs reports ces derniers mois, le projet de loi « pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration » (« projet Darmanin ») est actuellement étudié au Parlement. Très discuté, le texte comprend notamment une nouvelle réforme de la Cour nationale du droit d’asile (CNDA), juridiction administrative chargée d’étudier les recours formés contre les décisions de l’Office de protection des réfugiés et des apatrides (Ofpra). Oubliée des débats d’actualité qui se focalisent généralement sur l’immigration irrégulière, cette énième loi soulève tant de questions d’un report, voire un abandon, serait souhaitable.
L’objectif du projet Darmanin est officiellement double : « accélérer le traitement des recours contre les refus de protection et rapprocher le juge de l’asile de ses justiciables » (avis du Conseil d’État du 26 janvier 2023, n°406543). Sur ces deux volets, elle soulève des questions majeures concernant la bonne administration de la justice de l’asile, au point que l’intérêt même d’une réforme est douteux. Cette dernière passe, surtout, à côté des trois véritables enjeux que sont l’allègement des journées, la formation des juges et la création d’un cadre déontologique clair. Nous proposons dès lors un moratoire sur la justice de l’asile, urgent afin de préserver l’acquis et de garantir les conditions d’un débat public apaisé sur la réforme de ce système. Celui-ci doit permettre de mener un débat sur divers aspects essentiels du texte, avant d’engager une réforme véritablement systémique de la Cour.
Retrouvez les 8 propositions ci-dessous
Fichiers
Publié le 20/11/2023
L'auteur
Raphaël Maurel
Directeur Général